Marion POTHIN
AORA
J’ai deux casquettes : je suis formatrice pour adultes et médiatrice sociale, auprès des personnes sourdes.
Peux-tu nous en dire plus sur ton métier ?
Il y a 3 volets dans la médiation sociale :
- Il y a la gestion de conflits : offrir un espace de discussions, d’échanges entre deux parties qui sont en difficulté de communication. Il y a un cadre, des règles, qui font que chacun peut s’exprimer et être entendu, pour qu’ensemble les parties puissent trouver des solutions qui arrangent tout le monde. C’est du gagnant-gagnant, on cherche vraiment ça.
- Le deuxième volet de la médiation sociale c’est l’accompagnement aux droits et services. En l’occurrence, quelqu’un qui a une problématique avec une des administrations françaises, et qui a besoin d’être accompagné pour une démarche, un dossier, etc.
- Et enfin, ça peut être de l’accompagnement de projet : c’est de la mise en relation. Le médiateur a un réseau, et il sait vers qui se tourner pour accompagner la personne au mieux dans son projet.
Chez AORA, pour la médiation, on ne s’adresse qu’à des personnes sourdes.
Peux-tu nous en dire plus sur ton parcours ?
J’ai commencé à apprendre la langue des signes à l’époque du lycée, dans des petites associations de quartier, et ça ne m’a jamais quitté. J’ai, ensuite, continué à la fac, puis j’ai intégré une école à temps plein à Paris, où j’ai fait une école intensive en langue des signes.
Ensuite, j’ai fait une licence en sciences de l’éducation, et je suis devenue enseignante spécialisée pour les enfants sourds, dans une structure dans le sud de la France.
Par la suite, j’ai arrêté ce métier parce que j’ai eu mes enfants (j’ai 3 enfants), et j’ai fait une pause pour les élever. Après cette pause, j’ai fait une formation en médiation sociale, et je suis devenue médiatrice.
En arrivant ici, à la Réunion, j’ai commencé à être bénévole dans des structures et j’ai découvert qu’il y avait des besoins, et que j’avais des solutions à proposer. J’avais des idées, et la gestion de projet, c’est quelque chose qui ne me fait pas peur, donc j’ai commencé à travailler sur le projet AORA en 2018, et la société a été créée en janvier 2020.
Pourquoi avoir créé ton entreprise ?
Parce qu’il y avait des besoins. Il y a déjà des associations sur le terrain réunionnais qui font un super boulot, mais j’ai constaté assez rapidement, en tant que médiatrice, qu’aucunes administrations ou entreprises privées n’étaient accessibles aux sourds. Pour la culture c’est pareil. Il y a beaucoup de travail à faire en termes d’accessibilité, d’un point de vue administratif et d’un point de vue culturel.
Ce sont mes deux branches d’activités dans la médiation, et ce sont aussi les demandes les plus nombreuses que j’avais, du coup, on s’est orienté vers ça avec AORA.
Un moment bonheur et un moment galère de ton parcours d’entrepreneur
Un moment galère/bonheur ça marche ? Le fait de devoir travailler à domicile, au départ, et donc de commencer à avoir une équipe salariée et d’être chez moi : ça c’était bonheur : on a de supers souvenirs, on a eu mal au cœur de quitter cet espace de travail. Et en même temps qu’est-ce que c’est galère de travailler chez soi, de créer un espace, quand tu as 3 enfants, que tu as les horaires d’école à gérer, … Olala, c’est galère/bonheur, c’est le début d’une entreprise !
Un conseil à donner à un jeune entrepreneur
Oui ! De s’entourer tout de suite. Moi, je n’ai pas hésité pour ce qui était la partie comptabilité et droit. Je suis allée voir un comptable et une avocate, de suite. Parce que quand on est entrepreneur, on maîtrise son métier, un certain environnement, mais il y a plein de choses qu’on ne sait pas faire, et il ne faut pas s’inventer. Parce que c’est dangereux légalement, c’est dangereux juridiquement, et c’est dangereux financièrement : on peut vraiment prendre des directions compliquées.
Au moment de m’entourer, certaines personnes se sont proposées et d’autres je me les suis accaparées : je leur ai dit vous ne m’avez pas choisi mais moi je vous ai choisi, je ne vais pas vous lâcher. Il faut appeler, envoyer des mails, se déplacer, demander conseil, un maximum.
Et en plus, il existe plus de structures et de conseils que ce qu’on imagine : il ne faut pas s’arrêter au premier service où la personne dit « je ne sais pas, je ne sais pas », elle ne veut pas nous répondre. Il faut vraiment taper aux portes et trouver les bons interlocuteurs.
Pourquoi avoir choisi The GreenHouse Coworking ?
Parce que tout était parfait : la situation géographique, parce qu’on a des gens de l’équipe qui viennent de Saint-Denis, de Saint-Leu, de Tampon et de Saint-Joseph. En termes d’accessibilité : on a beaucoup de clients et de partenaires qui ne sont pas véhiculés, et donc la gare de bus à côté, c’était parfait.
Les locaux sont top, comme on les rêvait : c’est, à la fois, moderne, classe, propre, bien décoré, mais surtout ça nous correspond en termes de valeurs, et d’ambiance. C’est très calme et on peut travailler sereinement, et en même temps il y a une espèce de joie en fond qui est là, et c’est sympathique, parce qu’on a plaisir à venir travailler, et ça dès le premier jour. Donc voilà, c’est parfait !
Quels sont les avantages à travailler dans un coworking ?
Nous, on avait besoin d’avoir un bureau avec plusieurs postes de travail parce qu’on travaille ensemble et qu’en langue des signes, on ne peut pas se permettre de ne pas se voir. Donc là, on est en face les unes des autres, on peut communiquer en permanence dans la même pièce : c’est exactement ce qu’il nous fallait.
Et on avait besoin d’une salle de formation et de réunion, parce qu’on est organisme de formations. Et ça aussi c’était l’idéal. Alors le fait qu’il y ait la cuisine, les toilettes et tout le reste, c’était mieux que ce qu’on pouvait imaginer.
Au début, quand on a fait la liste de ce qu’on voulait, c’était introuvable. Et on se disait, on va devoir gérer le ménage, acheter de la vaisselle, acheter du mobilier, etc. c’était ingérable. Quand on est une petite structure comme nous (on n’a qu’un an d’existence), ce qu’on voulait pour pouvoir recevoir du monde et travailler dans de bonnes conditions c’était inatteignable. Et là, c’était la solution parfaite, clé en main.